31 mai 2006

Wed. 31 May - Les brunes comptent pas pour des prunes

Ah, la petite Lio... c'est toute mon enfance qui se repointe...
Enfin, je voulais juste pas oublier celle-là, et ce coup-ci, ça sert à rien de jouer en Anglais.
Avec David, on parlait cinéma, puis on est tombé sur Poelvoorde dans Le Boulet et on se remémorait la scène de l'arrivée à l'aéroport, dans les toilettes, où il est aux urinoirs, déguisé en noir, et que le gars à côté de lui le regarde en haut, en bas, puis très perplexe. Perplexité que David interprète (comme moi) par le fait que si Poelvoorde (sais plus son nom dans le film) a la figure et les mains peintes en noir, sa clenche, elle, est toute rose. Et là, Carolina nous annonce que ça devrait pas le surprendre, que c'est comme ça aussi sur tous les noirs naturels. C'est vrai ça???

29 mai 2006

Mon. 29 May - A Forest [Cure]

Due to the increasing success of my stories and by popular request (a whole two!), here comes the very first entry in English, sign that I may after all start to somehow blend into the cultural/linguistic landscape. So I'll continue my trip through the various facets of my vision of this country after 3 months being here. Ce qui est cool, c'est que je peux toujours passer au français pour disséminer quelques sarcasmes, ça me donne l'impression qu'ils resteront un peu privés, c'est pas plus mal pour la liberté de calomn... euh, d'expression. Today, georgaphics, an introduction to the second largest country in the world. Well, that's not that different from back home, I live in the 211th largest country in the world. The similarities don't end there, for one, Canada is as flat as Jane Birkin and as Flanders. I'm sure cycling is a very convenient way to travel here. Except that at the very instant I jump on a bike, flatness somehow vanishes and I am all panting and breathless in less than five minutes. L'autre jour, on est partis dans un bled perdu pour faire du mountain bike. Dans la voiture, on ricanait pas mal devant tout ce plat pays qui nous rappelait les reliefs de Middelkerke, puis tout à coup, tout autour du loueur de vélos, c'était le mur de Huy (en plus petit) et j'étais mort-fait en 5 minutes!
In Canada, there's one single direction: North. Everything seems to happen North: skiing, camping, biking, sailing, bear-touring, Hudson Bay, beaches, natural parks, 4x4-ing, skidooing, wildlife, unexplored country, primary forest, oil sands, goldrush, the great outdoor, canoeing, you name it. Well, except a bunch of irréductibles Gaulois qui résistent toujours et encore à l'envahisseur anglo-saxon, East; higher, greater, better skiing, West; et les fous dangereux, South.

Soit les Canadiens ne connaissent pas les «3 petits cochons», soit il n'y a pas de grand méchant loup par ici; toujours est-il qu'ils construisent toutes leurs maisons en bois. Impensable en Belgique! About building houses, it seems that the smaller unit of construction is the Village, most as was the case in the 70's in eastern Europe and Russia, or in the 90's in SimCity: one day, the mayor declares "Those fields be residential area!" and the next thing you know, 1,200 new wooden houses, all identical two-stories, four-windows, small neat lawn-and-flowers frontyard are sitting there, open for human colonization. Now comes the heart of the village, that crowdy, animated, living, swarming, never-sleeping place, the home to the spirit of the Village: the Shopping Mall! Such prestigious names as Tim Horton's (café to-go), Mac Donalds [with Drive thru™] (burgers to-go), Wendy's (carton-pâte to-go), Blockbusters (DVD to-go), CIBC drive-in (money to-go, sisi je vous assure, des MisterCash où qu'on doit pas sortir de sa voiture pour ramasser le magot, j'vous jure!), Petro-Canada (comme le Burger King, mais une autre fraction de la colonne de distillation, to-go), Home Depot (tout le reste), Ikea (pour ranger ce qu'on a acheté dans tous les autres). And voilà! a new village is born. Oops, sorry, forgot to mention the Church. The Catholic Church. And the Anglican Church. And the Ukrainian Baptist Church. And the Lithuanian Evangeslist Church. And the Judean People's Front Revival Church. Not to forget some Mosques, Temples, Synagogues and the Irish Pub.



Toronto is a pure-style Northern American city: grid pattern, compact financial district, wide streets, lots of cars everywhere. In a way, there are really two cities: on the lake shore, there's a lovely cité balnéaire, pier, quays, big towering condos with view on the lake, sails, recreation centre, promenade des Anglais, very nice. Then, again, everything goes North: an ugly urban twin highway + parking lots everywhere (right under my window, mmmmh I'm lovin' it!™), next financial skyscrapers (forming the famous Toronto skyline, nice looking), next some more city plus shopping centre (Eaton, where I work), next the northmost part of the city is Bloor street, with Bloor and Yonge being shopping area for lazy people: you spend there (Gucci, Prada, Dolce & Gabana, Dior,...) on one single item much more than what would otherwise take you the whole day and lots more weight to carry in an ordinary shopping session.
Then, to the West is High Park and the Humber river, an amazing green and peaceful and quiet area right in the center (well, not quite, in fact, a little West as I just said...) of the city. Very beautiful. Then I think there's a little more to the city that I don't know probably.
I've heard that up North, between Bloor and the polar circle, far away in the wild, stands Eglington and then Finch and then even some more, I just learned today. That's probably right next to Barrie or Ottawa. I think some of my teammates actually live there, with mooses and polar bears in their garden probably. I suppose it's midnight sun and all, up there, I must manage to get invited there once for the unique experience.

Sun. 28 May - With or without you

Comme me le signalait Olivier tout à l'heure, il y a pas mal de chance que je ne voie pas Noémi cette semaine, parce que j'ai un delivery vendredi, ce qui veut probablement dire quelques longues journées en perspective. Il fait complètement estival ici, et la chaleur et le relatif inintérêt de la phase palliative du projet OTIS plongent tous mes collègues dans une oisiveté assez patente. Je suis le seul à encore foutre quelque chose dans tout ce bordel... du coup je me venge et je fais bosser mon équipe plus tard :-)

Hier on s'est retrouvés à la plage, quelque part au nord de Finch (pour situer, Finch c'est le nord de Toronto, on est déjà quasi dans le cercle polaire). Jolie plage, du style sable + mer, sauf que la mer ici n'est pas salée, plus bungalows et nids à touristes, mais les touristes n'ont pas encore éclos cette saison, c'était donc plutôt agréable.

Lena n'a pas encore complètement intégré la localisation exacte de la bouche sur sa tête...

Noémi, dans une interprétation très personnelle de «I like to move it move it»




Les mêmes, deux mois plus vieilles.

Attention, photo adultes non-admis / interdit aux plus de 6 ans...

27 mai 2006

Mon. 22 May - Last Stop: This town [Eels]

J'ai ramené l'équivalent d'une bonne dizaine de milliers de mots du MoMA, selon le taux de change habituel de l'image ou du dessin...



A tout seigneur tout honneur, le tableau le plus célèbre de la gallerie, le «Starry Night», où les initiés reconnaîtront le village de Tourinne-la-grosse



Il y a aussi une collection impressionnante de Picasso, ici le plus laid et un insolite que j'ai trouvé comique

Un autre compatriote qui a émigré ici...



Et pour finir, un autre Daliesque (ils ont ici l'excellent «Persistence de la mémoire», que j'ai trouvé étonnemment minuscule), dont je viens de retrouver le nom sur le net (et même sur le site du MoMA lui-même): L'«interno metafisico» Giorgio de Chirico


Après ces peintures somme toutes fort classiques, je passerai la semaine prochaine aux croûtes et objets plus ésotériques, ou autrement dit, comment faire profiter à tous de mon ignorance en la matière...

Un aperçu?

Ah non, zut, ça c'est une photo du gribouilli que Noemi a offert à sa mère pour la fête des mères...

24 mai 2006

Sun. 21 May - Eden [Hooverphonic]

Ce week-end, je rends visite à David et sa petite famille, dans le Connecticut (ça ressemble un peu à Rhodes-St-Genèse). Entre deux parties de Kahuna, on va rendre visite aux éléphants de Central Park. Bruno (c'est le fils de David) aime beaucoup les éléphants, qu'il appelle des "Dumbos", ce qui représente tout de même près de 25% de son vocabulaire!

Pour éviter qu'ils ne troublent l'ordre public, les Dumbos ont été emapaillés et parqués dans un grand bâtiment juste à côté du parc, avec plein d'autres animaux, quelques autres expos, des guichets et pas mal de touristes -- les touristes ne sont pas empaillés, eux.




A côté des éléphants importés d'Afrique ou d'Asie, on y trouve aussi diverses autres bestioles (ici, quelques rongeurs malheureux et un oiseaux des plaines) typiques de la région.


Darwin est à l'honneur cette année, une partie du musée lui est consacrée. L'expo relate la vie de Darwin, raconte et illustre les principes de la sélection naturelle, puis nous rappelle que cette théorie, aussi vieille, fondée et évidente soit-elle, est cependant mise en doute dans certains coins reculés du monde, où l'obscurantisme religieux entrave encore la marche du progrès et de la Connaissance: dans les peuplades primitives du fin-fond de la jungle de Bornéo; dans les peuplades incultes de l'Arkansas ou du Tennessee...



Une tache noire au centre d'une tache verte au centre d'une tache grise sur la planète bleue...

Pour le lunch, on a trouvé un endroit vraiment sympa sur Broadway (au coin de la 58ème rue si mes souvenirs sont bons), un resto où on mange, sur des grandes tables conviviales, des tartines avec toutes sortes de bon chocolat... Ca m'a semblé très bon et m'a ramené pleins de bons souvenirs en bouche. Ca s'appelle le "Pain Quotidien", ça vous dit quelque chose?

Demain, je visite le MoMA, un musée rempli d'œuvres de petits artistes locaux pas très connus chez nous: Picasso, Matisse, Magritte, Monet, Miro, Van Gogh,...

18 mai 2006

Wed. 17 May - Sexy boy [Air]

J'ai pas fait exprès pour la chanson... Et bon anniversaire à Magdalena, c'est dans 1 minute.

Bon, le point sur ma vie sentimentale, sexuelle et affective, donc.
Eh bien le voilà
|
|
|
|
|
|
|
|
V

.

14 mai 2006

Sun. 14 May - In between days

J'ai bien failli prolonger ma soirée tango (quel con je fais, avec mon expérience de toute une heure de tango argentin, j'ai pas été foutu d'inviter ma cavalière à une seule danse décente, pourquoi j'ai pas été me fourrer dans une soirée de Samba, de valse viennoise ou encore de Paso Doble?) par un night-club jusqu'aux petites heures, mais les files d'attente m'ont découragé. Donc, j'ai tout le temps pour finir ce point sur le travail de manière un peu plus personnelle, maintenant que j'ai planté le décor (dans le post d'hier, enfin de ce matin).

Je suis le DevManager de mon projet. Je ne suis pas le big boss du projet, il y a une Project Manager au-dessus de moi: elle gère la hiérarchie, les budgets et les plannings et moi je gère tout le reste. Si on poursuit la métaphore avec le navire (j'ai regardé La Planète au Trésor récemment, ça m'a marqué), j'en suis le capitaine et elle l'armateur. Tous les DevManagers de OTIS sont des gars qui comprennent que dalle au développement, gèrent leur projet comme une chaîne de mise en bouteille de Coca-cola et passent leurs journées dans des meetings. Les seuls qui font exception sont Olivier et moi, et je crois que nos développeurs apprécient beaucoup d'avoir des managers qui sont capables de les comprendre et de leur donner des directives pas totalement absurdes. Et à l'inverse, le management apprécie aussi qu'on sache de quoi on parle et ce qui se cache effectivement derrière les chiffres des rapports.

Je trouve mon boulot absolument passionnant, chaque jour m'amène son lot de surprises, défis, enseignements, discussions, débats d'idées, satisfaction du travail accompli,... Je m'endors chaque soir avec la volonté de profiter du lendemain pour résoudre un paquet de problèmes qui m'attendent et en général, la fin de la journée arrive sans prévenir alors que j'avais encore des tas de trucs à faire (notamment il m'arrive parfois de rater la pause café, quelle horreur), ou que j'avais justement une discussion d'architecture à mener avec l'un ou l'autre qui est en train de faire ses paquets ou qui est déjà parti. Si ça ne tenait qu'à moi et si je faisais pas un peu attention, je resterais parfois bien travailler, discuter,... jusqu'au bout de la nuit. Il n'est pas rare que je m'y remette le soir chez moi.
Un côté particulièrement intéressant est la composante de gestion de l'équipe. A l'opposé des modèles que j'ai connus auparavant, je gère mes 8 bonshommes de très près, j'essaye de faire le point avec chacun au moins tous les deux jours, j'essaye d'anticiper et de pourvoir à tous leurs besoins (je les invite même à manger avec moi), je m'intéresse à ce qu'ils font et revois leur travail avec eux, je les implique dans les décisions d'architecture,... ce qui est parfois épique, entre les différences de langues, de cultures, d'habitudes, de manières, les attitudes des uns et des autres (le buté, l'influençable, le fonceur, les juniors, le qui-s'en-fout,...). Une petite note au passage sur la différence entre gérer une équipe de contractants par rapport à des bénévoles, que j'ai eu à gérer dans une vie antérieure: les contractants, eux, ils font ce qu'on leur demande, ce qui fait 2 différences majeures!

Enfin, je suis assez satisfait du résultat, qui est qu'après 3 semaines de travail, j'ai une première version du programme qui tient la route, avec un environnement fonctionnel et efficace, un processus et une équipe sous contrôle, des gars motivés qui ont dû tout au plus aligner quelques heures supplémentaires les deux-trois derniers jours (la normale étant plutôt de travailler 10 heures par jour y compris les week-ends), une batterie de tests automatiques qui tourne en permanence.
En plus, comme je rapporte directement à un Partner de Capco, je bénéficie d'une très bonne visibilité sur ce que je fais... Professionnellement donc, je suis très content de ma situation, j'accumule une expérience incroyable et je vois l'avenir assez sereinement.

Bon, on peut dire que sur ce coup-ci j'ai assez violemment dérogé à mon principe d'humilité. Question de remettre la balance d'équerre, je peux faire demain le point sur ma vie sexuelle et affective. Ca va aller vite.

13 mai 2006

Sat. 13 May - Taste [Ride]

Je continue mon petit point de la situation après 2 (qui entre temps sont devenus 3) mois ici, aujourd'hui: le travail.

Capco a signé il y a 3 ans un contrat avec la banque CIBC pour moderniser leur chaîne de traîtement des opérations bancaires contre un chèque gros comme un maison (enfin, gros comme tout un quartier serait plus proche de la réalité): «OTIS». Les impératifs du staffing (excusez l'anglicisme: le Robert&Collins me propose «dotation en personnel», vous trouvez ça mieux?) ont généré une belle vague d'immigration des 4 coins du monde vers downtown Toronto: Capco fournissait tous les cadres et directeurs du projet, qui sont donc des Belges et des Anglais pour la plupart, et tous les développeurs étaient des contractants trouvés ici (souvent des gars tout aussi importés que nous, à l'exception que ceux-là se sont importés tout seuls).
On m'a raconté qu'à l'époque, tous les expatriés de Capco, vivant tous frais remboursés, menaient la belle vie, sortaient comme des sauvages (les Anglais et les Flamands sont déjà pas des clenches dans cette discipline, mais quand en plus ils arrivaient à tout faire passer sur la note de frais, j'ai du mal à imaginer les têtes des lendemains!...). A côté de ça, il faut reconnaître que l'expat est rarement syndicaliste ou près de ses heures: certains d'entre eux ont passé la majorité de leurs week-ends à bosser. Sans belle-famille chez qui aller prendre la tarte le dimanche midi, avec des copains qui sont justement les collègues qui bossent eux aussi le samedi, il a pas grand chose à perdre à bosser tout le temps (enfin, pas trop tôt le matin, surtout!)

Tous ces gens travaillaient donc gaiment à la construction d'un système informatique géant destiné à réduire les coûts de la banque (je crois d'ailleurs que le chèque de Capco n'est pas autre chose que le reflet des économies réalisées par la banque). Ca ne fait de secret pour personne, ici comme ailleurs, "réduire les coûts", c'est avoir moins de personnel: ne pas remplacer ceux qui s'en vont, remplacer des spécialistes coûteux par des agents polyvalents moins qualifiés ou à l'inverse, remplacer plein d'agents peu qualifiés par deux spécialistes, virer les consultants, virer quelques employés aussi,... Comme je l'ai déjà raconté, cette banque fourmille de gars qui font tous une toute petite tâche très précise, dirigés par des couches et des couches de contremaîtres, sergents et autre sous-chefs, le tout chapeauté par des managers qui pilotent le tout à partir de rapports foireux issus de systèmes informatiques hétéroclytes et aléatoires. Tout ce machin tient surtout par la force de l'habitude, qui mène à un équilibre assez lointain de celui atteint par la force de la logique... Je suis sûr qu'à y regarder de plus près, on peut trouver des départements complets où chacun a honnêtement l'impression de faire correctement son travail, mais qui au final n'apportent strictement aucune valeur ajoutée au mastodonte (Qui a parlé de l'administration belge???). Mon expérience personnelle avec cette banque est probablement assez illustrative: dès la première semaine de mon arrivée ici, j'ai fait une première demande pour avoir une carte de crédit. Après 3 mois, j'en suis à ma 4ème demande (une à l'agence, deux par formulaire et la dernière par le web), j'ai dû parler à 4 personnes différentes, prendre 3 rendez-vous à mon agence et leur faxer 3 paquets de documents. Tout ça pour avoir une carte de crédit pour laquelle ils me demandent d'immobiliser en garantie la totalité de la limite d'utilisation... où est le "crédit" dans tout ça? Je pense qu'effectivement, ils ont de la marge pour améliorer le service.

En capitalisant sur le succès d'OTIS, à la fin de l'année dernière, quelqu'un a vendu l'idée de «EBO», mon petit projet, 40 fois plus petit qu'OTIS. Pas de volonté d'économie ici, mais simplement le fait de remplacer un système dépassé et inadéquat qui leur cause pas mal de soucis de fiabilité. Je devenais donc le capitaine du petit chalutier qui navigue à côté du paquebot transatlantique.

OTIS arrive maintenant en fin de course, ce qui devait être conçu l'a été, ils en mettent d'ailleurs une partie en production aujourd'hui même. C'est un succès pour des tas de gens, le projet a effectivement modernisé le traitement des opérations, plus fiable, plus rapide,... Dans la foulée, les vendeurs de Capco se sont dit qu'ils allaient surfer sur ce succès pour proposer de refaire le coup avec la division d'à-côté. Il y a 3 mois donc, on sentait assez bien l'effervescence de l'équipe qui préparait tout ça dans un grand secret, l'excitation des premiers jours était de retour!... OTIS-2 le retour, nouveau projet intéressant, du travail pour tous, rien que du bonheur! Mon projet devenait en quelque sorte le pont entre ces deux géants, destiné surtout à conserver le savoir-faire et ne pas laisser ces gars compétents s'évaporer dans la nature. Sauf que petit à petit, le manque d'une annonce fracassante, les rumeurs, les doutes, les expats Anglais qui rentrent à Londres,... ont fini par avoir raison de notre optimisme et laissé place à une certitude croissante que la fin d'OTIS n'allait céder la place à juste rien d'autre. Ca commence à sentir sérieusement la démobilisation, ils se barrent tous l'un après l'autre; ceux qui restent passent leur temps sur le web à éplucher les annonces et chercher leur prochain emploi, on pense en refourguer certains chez moi, question de les prolonger pour quelques mois. M'en vais donc me retrouver dans un rôle de dernier des Mohicans sous peu, moi...

Enfin, la vie continue et Capco a déjà mis les pieds dans un autre gros projet à Mississauga. C'est un endroit tout à fait charmant à 50 km de Toronto: un zoning comme ils en sont les champions ici. Il y a là-bas: des buildings, des routes et des parkings. Le scénario le plus proche de "on va manger un bout ce midi" est: on sort du building, on traverse des étendues de parkings, on traverse l'autoroute, encore quelques parkings et au bout de dix minutes, la terre promise: un Mac Donalds (un drive-in?). Alternative: on prend une voiture, puis on a le choix entre un restoroute, un autre drive-in ou un truc convenable à une demi-heure de route. Ajouter à ce tableau déjà alléchant les navettes matin et soir, l'obligation d'avoir accès à une voiture, et ça devient carrément attirant: plus besoin de se casser la tête pour savoir dans quel pub on va aller boire un verre ou quel film on va aller voir à la sortie du boulot! Mmmmh, la vie comme les vrais d'ici: travail-voiture-dormir, j'en rêvais!

05 mai 2006

Fri. 5 May - Elle tricote du vieux pain sur son balcon [Philippe Lavil]

Une fois de plus, je fais du real-time. J'ai mis la main sur un podcast de Pure-fm et je suis plongé dans un excellent "5 heures cinéma" de Hugues Dayez et Rudy Leonet, qui sont toujours très flatteurs sur leur programmation musicale (par ailleurs choisie avec un soin tout particulier dans les bacs les plus poussiéreux des invendus des disquaires les plus reculés)...
Point cinéma, donc, aujourd'hui. Deux excellentes raisons de me réjouir:
D'abord ce podcast, qui va me permettre de me remettre à jour au niveau de l'affiche cinéma, question d'aller plutôt voir "Inside man" plutôt que le top des entrées, "R.V."... Depuis que je suis ici, j'ai un peu perdu mes repères de ce côté-là, en l'absence de Pure fm, de Laurent et des avis des uns et des autres. Les affiches ne m'inspirent rien du tout, je ne reçois aucune recommandation et la radio ne diffuse aucune critique valable. Il me reste le classements des meilleures entrées, mais en général, ça se traduit plutôt la liste des 10 films à ne pas aller voir (actuellement, 2 sur 10 obtiennent une cote décente sur IMDB).

Ensuite, j'ai découvert le cinéma Carlton, sur College St., à deux pas du boulot. Il me fait penser plus au Vendôme qu'au Kinépolis, donc il a tout pour plaire... J'ai trouvé un super-plan: comme le film est à 9h, ça ne sert à rien de rentrer chez moi entre la fin du boulot et le début du film. Donc, je reste bosser jusque vers 8h, je m'arrange pour faire bosser deux ou trois gars avec moi (en règle générale, dès que je plie bagage, il faut pas 10 minutes à mes bonshommes pour se barrer aussi), je vais manger avec eux puis je file au cinéma: tout le monde est content, j'ai boosté la productivité (4 personnes x 2 heures, ça fait un jour gratuit), je mange en agréable compagnie et je profite du film. Bon, le plan ne marche pas avec tout le monde: le tire-au-flanc qui s'est volatilisé à 4h30 (je pars prendre un café avec Olivier vers 3h30, on papote quelques minutes et quand je reviens, il a disparu!), la jeune mère qui doit s'occuper de son bébé et les deux chinois avec qui je dois communiquer par écrit sont clairement hors de ce genre de coup...

En élargissant le champ des activités culturelles, la ville offre quelques musées (mais je crois rien qui ne vaille celui d'Ottawa), trois ou quatre cinémas pas trop loin de chez moi, des salles de théâtre où ils passent notamment en première mondiale le Lord of the Rings: la comédie musicale, une salle de concert (genre Forest National) juste en bas de chez moi (mais rien d'intéressant en vue, dommage...), des tas de galleries d'art.
Je me suis fait inviter la semaine dernière au vernissage des travaux de fin d'année d'étudiants en tournage et réalisation (3h de projection d'ultra-courts métrages en noir et blanc, des tas de trucs assez plats, quelques-uns très chouettes, souvent comiques, pas mal de scènes violentes (au moins 5 films avec des armes à feu, du sang, de la boucherie, j'étais assez étonné, surtout le contraste par rapport au sentiment de sécurité que je ressens ici un peu partout), quelques foutages de gueule qui sentent la toute-dernière minute, quelques technofreaks qui font 5 minutes de générique pour 1 minute de film,...
Hier soir, c'était un vernissage d'une exposition de 3 jeunes artistes (peinture, photo) sur Queen St. East, où j'ai apprécié, dans l'ordre et comme un goujat: les autres visiteurs, la bouffe, les drinks et enfin les croûtes (non, ça c'est assez irrespectueux... en plus certaines peintures étaient assez réussies). Enfin, comme toujours avec ces plans de dernière minute (j'y ai été invité par une fille que j'avais croisée 10 minutes dans une soirée polonaise il y a des semaines), j'ai plutôt pas regretté, ça m'a donné l'occasion de rencontrer la neuropsycho, sa copine qui danse le tango, le latinisite, l'autre gars et sa femme qui voulait pratiquer son Français, la peintre... (tous des Polonais). Je dois dire que ça c'est le côté vraiment sympa des relations sociales ici (quoique... ils sont "d'ici" depuis quelques années de plus que moi, c'est tout), c'est que en sortie, on connaît vite plein de monde et tout le monde a l'air d'apprécier la compagnie des autres. En plus, ils craquent tous pour l'accent français et trouvent que c'est une siiiii beeeellllle langue, c'est assez surprenant. Enfin, c'est pas moi qui vais les contredire, finalement j'aime aussi vraiment bien cette langue qui nous réserve tant de surprises et qui nous permet autant de créativité dans la formulation des idées. Allez, je serais même presque fier d'écouter Indochine et Mylène Farmer, c'est dire! Bah, rayon musique, les Polonais m'ont avoué avoir appris le Français avec "Voyage Voyage", "Ca va comme ci, comme ci comme ça" (ça a un vrai titre ce machin?) et "La danse des canards"; tout ça vaut presque le magnifique "Schnappi"!

02 mai 2006

Tue. 2 May - No Aloha [Breeders]

Bon, allons-y pour un petit point après deux mois de tourisme, ou d'exil. Question de ne surprendre personne, et pour ne pas faire dans l'original, je peux commencer par la météo ou la bouffe. Rien qu'en évoquant le terme j'en ai déjà mal au ventre (ou est-ce la digestion de ce que j'ai avalé?), le choix se porte donc naturellement sur la bouffe.
Je sais pas si je me suis embourgeoisé depuis le temps des sandwiches rive-blanche (mets hautement réputé de la gastronomie néo-louvaniste, une demi-baguette à l'américain ou au fromage grillé, encore meilleur "à cheval", recouvert d'un œuf sur le plat), mais les plats d'ici m'inspirent au mieux une monotonie blasée et au pire un dégoût profond. Le Canadien, je veux dire celui sont les grands-parents étaient eux aussi Canadiens, tout au fond, ne l'oublions pas, c'est un Anglais. Oui oui, celui-là même des Fish&Chips, de la viande bouillie et du monopole du Cheddar. Alors pour varier un peu les plaisirs, notre Britton ami a décidé de se laisser influencer (envahir?) par ses voisins du sud, eux aussi ex-Anglais, tendance protéine grasse aux hormones.
Le résultat de cette débâcle anthropologique se paye cash dans son assiette: il s'agit systématiquement d'une portion surdimensionnée d'un truc viandu souvent gras, toujours plein de sauce, en général fade et pas bon. Pas grave, d'abord, il reste les salades! C'est bon, ça les salades, plein de bons légumes et tout et tout. Eh bien non, la salade selon le Canadien, c'est ramasser tout ce qui traîne en cuisine, mélanger le tout et servir en couvrant de fromage râpé (du Cheddar, tiens...) pour bien masquer le bazar. Puis ajouter un peu de gravy (de la sauce de cuisson de viande, arrangée de telle manière qu'elle ne goûte plus que l'épaississant), pour le goût... Parce question de goût, le cuisinier a surtout eu la main lourde sur la laitue, le navet, les machins gorgés d'eau, les carottes fourragères,...
Il ne faut pas être linguiste ou éthymologiste pour comprendre pourquoi «Bon appétit» ne se traduit pas en Anglais!

Heureusement, Toronto est plein de ces autres Canadiens, ceux dont les grands-parents vivaient à Pékin, à Katmandou, à Milan ou à Séoul. Là, on entre en terrain connu, les émincés de bœuf, les nouilles sautées, le canard laqué, la pizza 4 saisons... C'est rarement de la haute gastronomie, mais au moins on sait exactement à quoi s'attendre. Certains sont même un vrai régal (les Japonais, le grill coréen, certains Indiens)!

Mais alors de quoi je me plains? Les Thaïs, Chinois, Japonais, Indiens, Italiens, c'est les mêmes que chez nous; je suis pas un grand admirateur de la cuisine française et de son art de faire croire que les viscères sont comestibles; c'est tout de même pas le manque de Grecs?... Eh bien, j'ai trouvé: c'est le manque de toutes ces brasseries qui ne sont juste rien du tout et qui servent tous ces plats "normaux" de chez nous: le steak frites, l'agneau au thym, le demi poulet, les brochettes sauce fine champagne, les boulettes sauce tomate, le standardissime spaghetti bolo,... Ici, toute cette gamme de restos n'existe pas et est remplacée par une prolifération de snacks et fast-foods, notamment dans ces omniprésents food-courts (dans le PATH, non seulement on mange pas bien, mais en plus c'est sur une terrasse dans la galerie commerciale sous les néons!).
Du coup, j'ai trouvé l'endroit où on mange le mieux de toute la ville. C'est chez Ewa. Gratins, steaks, soupes,... Ca sent bon la bonne cuisine de chez nous (avec parfois un truc insolite qui vient de Pologne)!

Question boissons, on est tous égaux sous l'empire de Coca-Cola... L'ice-tea d'ici n'est pas pétillant. Les verres sont eux aussi plus grands que chez nous, mais par défaut ils sont remplis de galçons. C'est juste une affaire de traduction: «Un verre de Coca» se traduit par «A glass of Coke without ice».

Le service au resto est aussi assez particulier. D'abord, les gens font la file devant la porte du resto en attendant d'être amenés à leur place. Ensuite, le serveur se présente quand il arrive: «Bonjour, je m'appelle William et je serai votre serveur. Comment allez-vous?» Pendant le repas, William vient nous demander 5 fois si tout va bien et si on a ce qu'on veut. A la fin du repas, tout dépend de la longueur de la file à l'entrée: si d'autres clients attendent, la note arrive avant le dessert et les assiettes quittent la table à peine vidées. A l'inverse, si personne n'attend nos places, au moment où on veut demander la note, William est en train de faire le singe avec d'autres clients et on n'arrive plus à l'attraper. Et s'adresser à Jane, Jack, Clémentine, Robert, Mary, Claire, Andrew, Jacqueline, Walter, Li Chun ou un des douze autres serveurs qui sillonnent le resto en tous sens en permanence, c'est un crime de lèse-serveur, ça ne se fait pas!
La note elle-même est aussi source de surprise: En commandant le plat à $7.99 et une malheureuse boisson, la note montre $11.57 (ils ont ajouté les taxes au passage) et on est censé laisser un bon $13.00, pour remercier le serveur de sa sollicitude. Par contre, ils acceptent sans broncher les emmerdeurs qui payent avec 3 cartes VISA, 10$ sur celle-là, la moitié du repas sur celle-là et le reste sur la dernière!